Le géant mondial de l’optique Luxottica rallie Publicis


INTERVIEW – Arthur Sadoun, président de Publicis France, explique pourquoi une agence parisienne doit trouver ses relais de croissance à l’international.

Publicis France remporte le budget de communication de Luxottica, la première entreprise d’optique au monde (5,1 milliards de chiffre d’affaires), propriétaire des marques Ray-Ban, Oakley ou Persol et détenteur de 21 licences, comme Chanel et D & G. Luxottica pilote aussi 6 250 points de ventes, dont le leader américain Lens Crafter.

LE FIGARO – Comment une entreprise italienne, cotée à Milan et New York, a-t-elle choisi, sans compétition, Publicis France ?

Arthur Sadoun – Luxottica a sollicité plusieurs de nos clients pour recueillir leurs témoignages sur la façon dont nous travaillons ensemble. Les budgets publicitaires de Luxottica se trouvaient éparpillés, avec l’agence Cutwater (filiale d’Omnicom, basée à San Franscisco, NDLR) comme tête de pont créative. Luxottica entendait regrouper l’ensemble de ses marques mondiales au sein d’un centre stratégique et créatif fort. Luxottica a également choisi un groupe capable, depuis Paris, de mettre à son service ses meilleures agences locales dans les pays clés que sont la Chine, les États-Unis et l’Australie. Enfin, Luxottica bénéficie, chez Publicis, de la première force de frappe digitale dans le monde.

L’international se révèle donc un relais de croissance majeur ?

Publicis France a pour ambition de gagner des parts de marché à l’international. Le gain de Luxottica démontre notre capacité à accompagner des clients mondiaux à travers le monde depuis Paris et c’est le modèle de croissance que nous visons. Aujourd’hui, un tiers de nos effectifs a été recruté à l’étranger. Cette mutation, nous l’avons réalisée sous l’impulsion de nos clients historiques comme Nestlé, L’Oréal et Renault, ainsi que de nouveaux clients comme BNP Paribas, AXA, Orange ou Capgemini. Ce mouvement a permis à l’agence Publicis Conseil de réaliser, depuis trois ans, une croissance à deux chiffres.

Comment la crise a-t-elle modifié la donne sur le marché publicitaire ?

La crise économique mondiale, conjuguée à la montée en puissance du numérique, a bouleversé radicalement le marché. Cela a provoqué, dans les dix-huit derniers mois, chez tous les annonceurs sans exception, une remise en question profonde de leur modèle économique. D’où les interrogations qui surgissent sur la communication, sur sa nature, comme sur sa fonction en tant que levier de croissance. En France, la remise en compétition historique de la quasi-totalité des marques du secteur banque-finance témoigne de cette redéfinition. Or, toutes les agences ne sont pas taillées pour y répondre. Publicis France a misé sur l’innovation, ainsi que sur une solide culture du client, inscrite dans les gènes mêmes de notre entreprise. Pour reprendre l’exemple de la banque, Les Colocs, la série Web que nous avons conçue pour BNP Paribas allie innovation et efficacité au service du client. La série a totalisé 11 millions de vues en cinq mois !

Publicis France souffre pourtant d’un déficit d’image créative…

C’est vrai. Publicis est à la fois le nom d’une grande entreprise du CAC 40, incarnée par Maurice Lévy, et d’agences créatives. Mais les faits parlent pour nous. Publicis France est le groupe français le plus primé à Cannes, notamment sur le numérique depuis deux ans. C’est ce qui nous permet d’attirer des clients aussi en pointe sur l’innovation qu’eBay ou de faire de la page Oasis sur Facebook, la première page française avec 1,2 million de fans.

La consultation menée par Orange témoigne-t-elle de cette remise en question stratégique des marques ?

Il est important de souligner qu’Orange a renouvelé nos contrats pour 2011 et 2012, avant même que la compétition ne soit lancée. Il est rare qu’un client procède ainsi. C’est une preuve de confiance qui nous a beaucoup touchés. Au final, notre proposition a été retenue et nous en sommes fiers.

La réorganisation du groupe en France est-elle aboutie ?

Nous nous adaptons constamment au contexte économique et aux clients. Aussi rapprochons-nous deux de nos filiales: Publicis Activ Paris et Publicis EtNous. La nouvelle enseigne réunit 120 collaborateurs. Elle est présidée par Jean-Christophe Hérail, qui dirigeait déjà l’agence Publicis EtNous. Cette dernière devient le département dédié aux marques haut de gamme du nouvel ensemble. Nous reproduisons le modèle de Publicis Conseil: une agence généraliste, dotée d’une offre «luxe», nommée 133. Publicis Conseil se consacrant aux marques européennes à visée internationale, Publicis Activ Paris s’avère une agence à taille humaine qui allie la puissance du groupe, notamment sur le numérique, et la proximité.

Source: LeFigaro.fr

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